Dans le village, une case vide, la maison des morts. C’est là que l’on
écrit. Werner Lambersy raconte l’anecdote qui a donné l’impulsion à ce
long poème. Il ne faut surtout pas la situer, car le poème va nous
entraîner du Tage en Égypte, de Montparnasse à Babel, faisant de ce
court poème un art poétique universel. Écrire dans la maison des morts,
c’est d’abord un renoncement à la surface des choses. Il faut creuser
la langue pour traquer « le vide dans les mots », se laisser porter par
le souffle, qui donne le rythme ; par l’obscurité, qui efface les
contours et nous garantit contre le piège de la beauté, car on ignorera
toujours, et c’est heureux, ce qui la sépare de la perfection. Alors
naissent d’autres mots, car « les morts le savent / Qui gardent les
mots qui te dépassent ». Il faut dire que les morts ici invoqués ont
nom Wang Wei, Michaux ou Pessoa, sans parler d’Homère, de l’Exode ou
des prières aux dieux qui ne sont pas.